Circuler au volant d'un véhicule équipé de pneus lisses : quelles conséquences ?
Au-delà de l'évident risque d'accident, quelles peuvent être les conséquences ? Existe-t-il des sanctions pénales ? Quid en cas d'accident ? L'assureur "dégâts matériels" est-il tenu d'intervenir ? L'assureur RC auto peut-il exercer un recours contre son propre assuré responsable de l'accident ?
1. Sanctions pénales
Le fait de circuler au volant d'un véhicule équipe de pneus lisses est une infraction visée à l’article 81.4.1. du code de la route qui prévoit que :
« La profondeur des rainures principales des bandages pneumatiques ou semi-pneumatiques doit être d'au moins 1,6 mm, à l'exception des cyclomoteurs pour lesquels la profondeur des rainures principales doit être d'au moins 1 mm.
Par rainures principales, il faut comprendre les rainures larges situées dans la zone centrale de la bande de roulement qui couvre environ les trois quarts de la largeur de celle-ci ».
S’agissant d’une infraction du premier degré, elle est sanctionnée d’une amende de 60 € à 1.500 €.
Cette infraction peut être constatée à l’occasion d’un simple contrôle routier mais plus fréquemment en cas d’accident de la circulation, surtout lorsqu’un expert automobile est mandaté par le parquet ou par la suite à l'initiative d'une compagnie d’assurance.
2. Intervention de l'assureur « omnium » ?
Si vous avez souscrit un contrat d’assurance « dégâts matériels », plus couramment appelé « omnium », il est probable que les conditions générales applicables à cette police d’assurance prévoient une exclusion en relation avec l’état technique du véhicule couvert.
Les contrats peuvent varier fortement d'une compagnie à l'autre de sorte qu'il y est indispensable d'examiner attentivement les conditions générales.
Elles peuvent en effet prévoir l'exclusion en des termes très précis :
- "(…) sont également exclus les dommages causés par un manque de lubrifiants ou de liquide de refroidissement, par un mauvais entretien manifeste ou par l’usure (notamment pneus lisses)" (GENERALI, janvier 2015);
- "sont exclus de l’assurance les dommages (…) causés par l’assuré (…) en raison de l’une des fautes lourdes suivantes : conduite du véhicule alors que celui-ci ne répond pas aux prescriptions légales relatives à la profondeur minimale des rainures des pneus. Cette exclusion n’est toutefois pas applicable si l’assuré prouve qu’il n’existe aucun lien de cause à effet entre la faute et le sinistre" (P&V ASSURANCES, édition 04/2010);
ou de manière beaucoup plus générale :
- "ne sont pas assurés les sinistres qui résultent d'un manque évident d'entretien ou de défauts techniques du véhicule assuré ou de sa remorque dont le conducteur aurait dû savoir qu'ils interdisaient le véhicule à la circulation" (BELFIUS INSURANCE - LES AP ASSURANCES - 06/2014);
voire ne prévoir aucune exclusion.
Quel que soit le texte prévu par le contrat d'assurances, se posera inévitablement la question du lien causal entre le défaut technique affectant les pneus et la survenance de l'accident.
Un bon conseil : vérifier toujours avec votre courtier ou votre compagnie d'assurance les risques pour lesquels vous êtes couvert mais également les exclusions prévues dans les conditions générales ou particulières.
3. Recours de votre compagnie d'assurance ?
Une troisième conséquence peut encore découler d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule équipé de pneus lisses : le recours de l'assureur couvrant ledit véhicule.
Cette fois, les textes contractuels ne varient pas d'une compagnie à l'autre : ils sont en effet imposés par l'arrêté royal du 14 décembre 1992 relatif au contrat-type d'assurance obligatoire de la responsabilité en matière de véhicules automoteurs.
En réalité, il y a peu de chances qu'une action récursoire puisse être exercée par la compagnie d'assurance.
Trois hypothèses peuvent néanmoins être envisagées.
La première est celle de l'omission ou de l'inexactitude intentionnelle dans la déclaration du risque : l'assureur démontre que l'assuré a roulé sciemment avec un véhicule équipé de pneus lisses malgré un avertissement préalable (procès-verbal antérieur, mise en garde d'un garagiste, ...). Dans ce cas, si l'assureur prouve en outre qu'il existe une relation de cause à effet entre l'état des pneus et la survenance de l'accident (le véhicule a dérapé par temps sec par exemple), il pourra récupérer les indemnités qu'il aura versées à la partie préjudiciée.
La deuxième concerne l'omission ou l'inexactitude non-intentionnelle dans la déclaration du risque : l'hypothèse est identique si ce n'est que l'assureur ne peut démontrer que l'assuré a délibérément souhaité continuer à rouler avec des pneus lisses (oubli, distraction, etc...) : le recours existe également mais il est limité à 247,89 €.
Enfin, la troisième est visée par l'article 25, 3°, c) du contrat type qui prévoit que "la compagnie a un droit de recours contre le preneur d'assurance et, s'il y a lieu, contre l'assuré autre que le preneur d'assurance lorsque le véhicule désigné est soumis à la réglementation belge sur le contrôle technique, pour tout sinistre survenu alors que le véhicule n'est pas ou n'est plus muni d'un certificat de visite valable (...)"
Dans cette troisième hypothèse, ce n'est pas la profondeur insuffisante des pneumatiques qui permet à la compagnie d'assurance d'exercer un recours mais uniquement le défaut de certificat de contrôle technique valable.